Le Bec-en-sabot du Nil (Balaeniceps rex) ou shoebill pour les Anglais, ou Abu-Markub (Père de la babouche) pour les Arabes du Soudan, est une espèce d'oiseau qui semble, de par son esthétique, sortir directement de la préhistoire. Il appartient à l’ordre des Pélécaniformes (Pélicans) et à famille des balaenicipitidés dont il est l'unique représentant. Son nom de bec-en-sabot lui vient de son bec en forme de sabot. Il est aussi appelé « cigogne à tête de baleine » en raison de la ressemblance qu'offre son gros bec, aussi, avec une tête de cétacé. Cet oiseau est un échassier au même titre que la cigogne ou le héron. Il est si farouche que les savants européens ne l’ont découvert qu’en 1850, à l’occasion des expéditions dans les immenses zones marécageuses de l’Afrique, aux sources du Nil. On connaît peu de choses des mœurs du bec en sabot qui est un oiseau difficile à observer dans son milieu naturel.
Le Bec-en-sabot du Nil était connu à la fois des anciens Égyptiens et des Arabes, mais il n’a été classé par les scientifiques modernes qu’au XIXe siècle.
Surnommé le roi des marais, l'allure « préhistorique » du Bec-en-sabot en fait un oiseau unique en son genre qui n'a pas encore livré tous ses secrets.
Le Bec en sabot du Nil est un oiseau endémique du continent africain, surtout présent dans les parties orientales et centrales de l'Afrique tropicale. On le trouve dans les lacs, grands cours d'eau et marais garnis de papyrus et de roseaux, particulièrement au nord de l'Ouganda (lac Victoria par exemple), à l'ouest de la Tanzanie, au Soudan du sud (au niveau du Nil Blanc) et dans le marais de Bangweulu au Nord-est de la Zambie. Globalement sa répartition est à peu près la même que celle du Protoptère (poisson pulmoné qui constitue sa proie favorite). Bien que son aire de répartition soit assez vaste, cet échassier est très rare et clairsemé.
Avec son apparence primitive, le Bec-en-sabot du Nil présente des similitudes avec les cigognes, les pélicans, les ombrettes et les hérons. De nombreux débats sont toujours en cours au sujet des espèces les plus proches de cet oiseau fascinant.
Le Bec-en-sabot du Nil est un grand échassier qui mesure entre 100 et 120 cm pour un poids de 4 à 7 kg. L’envergure de ses ailes peut atteindre 2,30 m.
Le dimorphisme sexuel est très peu marqué chez cette espèce. En effet, seule une subtile différence de taille et de grosseur du bec peut permettre de distinguer les deux sexes. Déterminer le sexe d'un oiseau isolé n'est donc pas possible. De même, il n'y a guère de différence entre le plumage nuptial et le plumage habituel.
ll n'y a pas de réel dimorphisme sexuel chez cette espèce : le mâle est juste un peu plus gros que la femelle et a un bec plus long.
Le plumage chez les adultes des deux sexes est gris, légèrement bleuté, à l'aspect granité. Les plumes principales sont noires à l'extrémité; les plumes secondaires peuvent présenter des reflets verdâtres. Le dessous de l'oiseau est légèrement plus clair que le dessus. Le Bec-en-sabot présente, sur l'arrière de la tête, une petite touffe de plumes qu'il peut ériger comme une crête. Les jeunes sont légèrement plus gris que les adultes.
Le Bec-en-sabot présente, sur l'arrière de la tête, une petite touffe de plumes qu'il peut ériger comme une crête.
Le bec est la principale caractéristique de l'espèce, car il ressemble à un sabot de couleur jaunâtre ou rosée. Il est taché de points sombres, grisâtres, et mesure 23 cm de long sur 10 cm de large. La forme du bec apparaît, en fait, très adaptée à la pêche en eaux troubles, peu profondes et encombrées de végétaux. Au lieu de harponner à la manière des hérons, le bec-en-sabot écope à l'horizontale. Il arrache ainsi du marais une véritable pelletée de matériaux où frétille la proie visée. Le crochet qui arme sa mandibule supérieure lui sert à pincer sa prise glissante, les bords tranchants à la découper. Le crochet de la mandibule supérieure lui permet également de se toiletter ou de rouler ses œufs.
Le bec est la principale caractéristique du Bec-en-sabot, il est aussi gros, voire plus gros que sa tête.
Les yeux du Bec-en-sabot du Nil sont situés sur le devant de la tête, cette position lui assure une vision binoculaire facilitant ainsi le repérage des proies. L'iris est jaune foncé chez le poussin, cette couleur s'atténue jusqu'à la maturité sexuelle où les yeux des adultes sont pâles.
Les yeux du Bec-en-sabot situés sur le devant de la tête, lui permettent d'avoir une vision binoculaire, facilitant le repérage des proies.
Les pattes sont longues et sombres, les orteils sont très longs et non palmés. Dans sa quête de nourriture, le Bec-en-sabot arpente les zones humides peu profondes d'un pas fait de lentes et grandes enjambées, tête penchée pour optimiser sa vision binoculaire.
Les pattes du Bec-en-sabot munies de doigts non palmés, sont longues et de couleur grise.
Dans les zones où les eaux sont plus profondes, il se tient souvent à l'affût sur un îlot de végétation flottante, ses grands doigts lui évitent alors de s'enfoncer trop rapidement.
Les longues pattes aux longs doigts griffus du Bec-en-sabot sont très pratiques aussi pour se gratter le cou.
Le Bec-en-sabot du Nil est un oiseau solitaire mais on peut cependant l'observer en couple au moment de la nidification, mais aussi en groupe dans les endroits où les ressources alimentaires sont abondantes. Il occupe généralement un territoire d'environ 3 km² (un couple peut couvrir jusqu'à 5 km²).
Lors de la saison de nidification, il devient très territorial et défend son nid contre les prédateurs, mais aussi contre tout intrus. Il est par contre peu farouche envers les Humains, les laissant souvent s'approcher fort près et se contentant de les regarder droit dans les yeux.
Le bec-en-sabot est peu farouche et se laisse approcher par l'Homme relativement aisément se contentant de le regarder droit dans les yeux.
Une légende raconte que si l’on fait la révérence à cet animal il ne s’envole pas et il serait même possible de le caresser après avoir gagné sa confiance.
Le Bec-en-sabot du Nil n'est pas migrateur. Mais si les sources de nourriture sont insuffisantes, il peut accomplir des déplacements saisonniers entre les zones de nidification et les zones de nourrissage. Comme les hérons, il vole avec le cou rétracté. Il décolle presque à la verticale en battant lourdement des ailes. Son vol est lent. À l'instar des cigognes, il peut planer et remonter les courants thermiques jusqu'à une grande hauteur.
Le Bec-en-sabot du Nil est une espèce carnivore, mais il se nourrit principalement de poisson, et particulièrement de protoptère (Protopterus annectens ), et aussi d’autres poissons qui nagent près de la surface. Opportuniste, il ne dédaigne pas compléter avec des tortues, des serpents d’eau, des lézards, des grenouilles, des jeunes crocodiles, des jeunes oiseaux aquatiques, des escargots ou des rongeurs.
Les protoptères ou dipneustes sont des poissons possédant un poumon fonctionnel en plus des branchies. Ils vivent en eaux peu profondes ou dans des marécages et utilisent leur poumon pour respirer en surface. Quand l'eau vient à manquer, ils creusent un terrier dans la vase et sécrètent un mucus qui les enferme dans un cocon ; ils peuvent y rester plusieurs années (en fonction de la durée de la sécheresse) avant d'en ressortir dès la première pluie.
Le Bec-en-sabot montre une grande patience lorsqu'il pêche. Immobile, la tête rentrée dans les épaules, il attend qu'un poisson approche. Parfois, il arpente lentement les roselières, attentif, jusqu'à ce qu'il repère une proie arrivant près de la surface. Le Bec-en-sabot projette alors le cou et la tête en avant et s'élance brusquement, ailes étendues, afin de saisir sa proie dans son énorme bec, ainsi que, le plus souvent, les végétaux environnants.
Le Bec-en-sabot chasse et pêche à l'affût ou en arpentant lentement les eaux peu profondes. Il tient souvent son bec pointé vers le bas afin de profiter de sa vision binoculaire, ce qui rend plus facile la capture de la proie. Une fois la proie repérée, il étend son cou et d'une détente foudroyante, plonge la tête dans l'eau. Le crochet placé à l'extrémité de son bec transperce la proie qui est ensuite décapitée .
Faisant ensuite le tri, il engloutit sa proie et rejette les plantes. A l'occasion, le Bec-en-sabot arrache d'abord la tête d'un poisson avant d'en avaler le corps. Le reste du temps, le poisson est avalé en entier, la tête la première. Dans tous les cas, l'échassier boit de l'eau tout de suite après son repas.
Après avoir avalée sa proie, le Bec-en-sabot se rince le bec et boit de l'eau.
Le Bec-en-sabot du Nil est un oiseau monogame et les deux parents participent à la construction du nid, à l'incubation et aux soins apportés aux jeunes. La saison de nidification varie selon la situation géographique mais coïncide généralement avec le début de la saison sèche. Le cycle de reproduction, de la construction du nid au départ des jeunes, dure entre 6 et 7 mois.
On connaît encore mal les parades nuptiales du Bec-en-sabot dans la nature mais, en captivité, il se balance, étire le cou et claque du bec de façon bruyante.
Une zone d'environ 3 m de diamètre est piétinée et nettoyée pour installer le nid. Ce dernier est situé généralement sur un îlot ou sur un radeau de végétation flottante. Les matériaux de construction (herbe, débris végétaux...) sont tassés pour former une grande structure d'environ 1 m de diamètre.
Une zone d'environ 3 m de diamètre est piétinée et nettoyée pour installer le nid.
Les deux parents participent à la construction du nid. Le nid peut faire 1m de diamètre.
Deux à trois œufs blanchâtres sont pondus. Il ne restera à la fin du cycle de reproduction qu'un seul petit, en effet, afin de s'approprier toute l'attention et la nourriture, le plus vigoureux des oisillons tuera le reste de la fratrie, les parents ne pouvant s'occuper de plusieurs rejetons, par risque de manquer de nourriture, ils ne continueront à nourrir que le petit le plus vigoureux. L'incubation dure environ 30 jours pendant lesquels les adultes retournent souvent les œufs, et les rafraîchissent en les arrosant d'eau ou en les recouvrant de végétation humide. A l'éclosion les poussins sont couverts d'un fin duvet grisâtre. Leur bec n'est pas encore aussi gros que celui des adultes mais possède un crochet terminal bien visible. Les adultes nourrissent les petits par régurgitation de proies dans le nid, mais les petits se nourrissent seuls. Les parents font de l'ombre aux oisillons et parfois les arrosent d'eau pour les rafraîchir.
L'incubation dure un mois durant lequel les deux parents couvent alternativement.
Le développement des petits est lent en comparaison avec la plupart des autres oiseaux. Pendant 35 jours, les oisillons ne peuvent pas tenir debout; un des deux parents les garde au nid pendant que l'autre part en quête de nourriture. Par la suite, les deux parents partent en chasse, laissant les oisillons seuls au nid. Les plumes ne sont pas totalement développées avant 2 mois et les petits ne peuvent pas voler avant 105 à 112 jours. Pendant encore un mois après l'envol, les parents continueront à nourrir leurs jeunes. En raison de leur développement lent, ces derniers atteignent leur maturité sexuelle à partir de quatre ans.
Le parc Pairi Daiza, situé en Belgique, est le premier parc au monde à avoir réussi en 2008, la reproduction du bec-en-sabot du Nil.
Étonnamment, un Bec-en-sabot du Nil peut vivre jusqu’à l’âge de 36 ans, ce qui en fait l’un des oiseaux sauvages à la longévité la plus importante.
Sources : Record Life Spans (years) of Birds
Le Bec-en-sabot du Nil peut vivre jusqu'à 36 ans en captivité.
Le Bec-en-sabot du Nil est menacé par la destruction de son habitat, principalement des zones de nourrissage (souvent asséchées pour les transformer en zones agricoles), mais aussi par la chasse pratiquée entre autres pour alimenter les zoos. On peut ajouter à cela la menace des incendies et inondations, ainsi que le piétinement des nids par les troupeaux allant boire.
Chasser le Bec-en-sabot du Nil est légal dans certains pays. C’est le cas en Tanzanie, où il est chassé pour être mangé.
Selon BirdLife International, la population, estimée à 12 000-15 000 individus en 1997, aurait été en 2002 de 5 000-8 000 individus.
Il est classé par l'Accord sur la conservation des oiseaux d'eau migrateurs d'Afrique-Eurasie dans la catégorie A1c, c'est-à-dire parmi les espèces dont il reste moins de 10 000 individus dans le monde, depuis 2002. La CITES a classé cette espèce en annexe II (espèce vulnérable à commerce réglementé) depuis 1987. L'UICN classe le Bec-en-sabot dans la catégorie "vulnérable", C2ii (population en déclin et estimée à moins de 10 000 individus) depuis 2004.
On connaît peu de choses sur les mœurs et les origines du Bec-en-sabot du Nil difficile à observer dans son milieu naturel. Menacé de disparition, on peut l'observer dans certains zoos tel que Pairi Daiza à Brugelette, Belgique.
Sources: (En anglais)
Animal Diversity Web
University of Michigan
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